Tomatin

Faisons connaissance avec les distilleries les plus réputées,
Suivons le Stills Tour par Gilbert DELOS

L100 02Où ?
Le village de Tomatin se trouve dans les Highlands, à la limite du Speyside, et à moins d’une  demi-heure d’Inverness par la route. La distillerie dispose d’un centre de visite ou vert toute l’année, avec possibilité de déguster des bruts de fût (20 euros les cinq) et d’embouteiller le whisky de son choix directement d’un fût.

Quand ?
Le nom Tomatin signifie “la colline des genévriers“, un arbuste très apprécié des distillateurs clandestins, car il brûle sans répandre d’odeurs particulières, ce qui favorisait leur discrétion. Le lieu a donc probablement abrité de tels distillateurs, bien avant que la distillerie ne soit créée par trois investisseurs en 1897, en plein boom du scotch whisky . Le site dispose d’une source abondante, Alt na Frith, et non loin d’une route (aujourd’hui l’A9) reliant Inverness au reste de l’Ecosse, tandis qu’une ligne de chemin de fer venait d’être mise en service à proximité.
Toutefois, si elle a survécu à la première crise qui suivit, elle fut mise en faillite en 1906, pour reprendre ses activités trois ans plus tard. Son existence fut ensuite paisible et sans histoire notable jusqu’ en 1956 : les propriétaires, toujours indépendants, se mirent à augmenter la capacité de production, avec deux nouveaux alambics, puis deux autres en 1958, et encore quatre en 1961, et même un nouvel alambic en 1964, faisant de Tomatin une des très rares distilleries écossaises à en posséder en nombre impair, soit 23 au total en 1974, l’année de l’arrêt du maltage sur place. Avec une production de 12 millions de litres d’alcool par an, ce fut à l’époque la plus grosse distillerie écossaise.
Ces investissements étaient-ils trop importants ? Toujours est-il que Tomatin est mise en liquidation judiciaire en 1985, mais est reprise l’année suivante par un investisseur japonais.

Qui ?
Après près d’un siècle d’indépendance (ce qui est rare dans l’industrie du whisky), Tomatin est donc rachetée en 1986 par les sociétés japonaises Takara Shuzo et Okara, qui étaient déjà en fait de gros clients de la distillerie. C’est la première fois que des investisseurs japonais prenaient pied en Ecosse, et ils seront suivis de plusieurs autres (Bowmore, Glen Garioch, Ben Nevis entre autres), à tel point que, selon Mad Madness, 20 % du scotch whisky appartient
aujourd’hui à des asiatiques.

Comment ?
Tomatin a été la première distillerie écossaise à s’équiper pour le brassage d’un lauter mash tun, c’est-à-dire d’une cuve possédant un système de couteaux verticaux pour mieux mélanger le grain et l’eau. Ce système s’est révélé plus performant que le précédent qui comporte un simple agitateur situé à la base de la cuve. En évitant la formation de gros grumeaux, l’extraction du moût est ainsi améliorée. Par ailleurs, la distillerie dispose de 12 fermenteurs en inox (entre 54 et 108 heures) et six paires d’alambics sont utilisées, car onze des anciens ont été supprimés en 2002. De quoi distiller 2,5 millions de litres d’alcool en 2015, dont une faible partie (environ 100 000 litres) est tourbée à 30-35 ppm, avec au final une capacité théorique de 5 millions. On est loin des 12 millions d’il y a 40 ans…

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Quoi ?
Les malts de Tomatin ont avant tout servis à élaborer des blends, notamment à sa grande époque J&B, Chivas Regal ou Johnnie Walker, et maintenant Antiquary et The Talisman. Toutefois, les embouteillages officiels des single malts ont débuté dans les années 90 avec un 10 ans d’âge, auquel a succédé un 12 ans en 2004.
Depuis, différents malts ont été commercialisés, en 25 ans, 18 ans, 15 ans, 30 ans et même 40 ans, ces deux derniers ayant été rapidement épuisés. Le premier malt tourbé, un 4 ans d’âge, a été lancé en 2010, à destination uniquement du marché japonais.
Aujourd’hui, la gamme officielle comprend sept références, dont le Legacy sans âge indiqué (appelé Dualchas sur le marché américain) et un Brut de Fût à 57,5°. Le plus âgé est un 36 ans à 46°.
Les malts vieillissent dans des fûts de bourbon, puis connaissent souvent une finition plus ou moins longue dans des fûts de xérès (fino, manzailla, oloroso et pedro ximenez) pour la série limitée appelée Cuatro.
Depuis peu, Tomatin a développé une gamme importante de séries limitées, comme un 12 ans finition en fût de chêne français, un 15 ans avec finition en fût de Tempranillo (cépage rouge espagnol), de nombreux millésimes, des fûts uniques, dont certains arborent sur leurs étiquettes des courtisanes chinoises à destination de Taiwan.
Grâce au Clan, j’ai pu déguster trois Tomatin :
• un 23 ans brut de fût à 51,9°. Beaucoup de dynamisme et de nervosité. Très fringant malgré son bel âge, à conseiller à l’apéritif… avec des sushis bien entendu.
• un 12 ans à 50,2° en finition rhum. Une fine dentelle qui manque tout de même de caractère, malgré la puissance alcoolique.
• un 17 ans à 42°, gamme Dun Eideann. Un malt un peu léger, certes, mais agréable à l’apéritif.
Il en reste donc beaucoup d’autres à découvrir.

NB : Ne pas manquer de se rendre sur le site www.tomatin.com.
Clair et très complet, il rend notamment un hommage tout particulier aux cadres et ouvriers de la distillerie. En effet, 80 % du personnel est originaire de la région, et beaucoup habitent sur place. Car, dans cette région agricole, les logements sont rares ; dès ses origines Tomatin a donc édifié des maisons pour loger son personnel, et il en existe toujours 32 à l’heure actuelle.
A noter aussi un film très instructif de 15 mn datant de 1958, montrant les différentes étapes de la production de l’époque, notamment le maltage sur aire.

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