Glendullan

Faisons connaissance avec les distilleries les plus réputées,
Suivons le Stills Tour   par Gilbert DELOS

Où ?
A Dufftown dans le Speyside. La distillerie est située au bord de la rivière Fiddich… dont elle n’a pas pu prendre le nom. Comme le sait, il était déjà pris ! Par contre, la rivière Dullan rejoint la Fiddich quelques centaines de mètres plus loin : l’honneur est sauf !
C’est la septième et dernière en date des distilleries de Dufftown, considérée comme la capitale du Speyside.

Quand ?
En 1896-97, la société William Williams & Sons d’Aberdeen, qui élabore et commercialise des blends (comme Three Stars ou Stradhon, aujourd’hui bien oubliés), décide de se doter d’une distillerie. Celle-ci va oeuvrer pendant des décennies sant trop faire parler d’elle, à part une fermeture dans les années 40 faute de malts d’orge disponibles. Elle est complètement rénovée en 1962, avec ajout de deux nouveaux alambics. Pourtant, de façon pour le moins étonnante, ses propriétaires décident en 1972 de construire une distillerie neuve juste à côté de l’ancienne,
et qui porte le même nom. Mieux, les malts des deux sont assemblés ensemble sous la même dénomination alors que selon certains dégustateurs de l’époque les deux whiskies étaient assez différents. Mais il est vrai que les ventes en single malts sont quasi nulles à l’époque. Ce jumelage assez unique dans l’histoire va durer une bonne dizaine d’années, jusqu’à la fermeture de l’ancienne distillerie en 1985.
En 2007, Diageo lance trois single malts, Glendullan, Dufftown et Glen Ord, peu répandus jusque là il est vrai, et qui portent le même nom : The Singleton, alors qu’ils ne sont pas vraiment identiques !
Au départ, ils sont destinés à des marchés différents (cf. paragraphe Quoi ?). Là encore, de l’inédit dans l’histoire du scotch whisky.

Qui ?
Après avoir changé de nom en 1919 pour Macdonald, Greenlees & Williams (Distillers) Ltd, la société propriétaire de Glendullan est achetée en 1926 par DCL, ancêtre de Diageo, le numéro un mondial actuel du whisky, qui en est toujours le propriétaire.

Comment ?
L’équipement et le process de production de Glendullan sont on ne peut plus classiques, avec une cuve de brassage de 12 tonnes (qui ne date que de 2010), 8 fermenteurs en mélèze et 2 en inox, et trois paires d’alambics. La durée de fermentation est de 72 heures pour donner une eau-de-vie plutôt épaisse et lourde. Ce qui justifierait, selon certains mauvais esprits, le nom de la distillerie, dull pouvant se traduire par terne, ennuyeux, assommant… La capacité de production est actuellement de 5 millions de litres d’alcool par an, ce qui en fait tout de même une distillerie assez importante en Écosse.

Quoi ?
Les eaux-de-vie distillées à Glendullan ont longtemps servi presque uniquement à élaborer des blends, et surtout Old Parr, un peu oublié aujourd’hui, dont le nom vient de Thomas Parr, un Anglais qui aurait vécu jusqu’à 152 ans. Le whisky, lui, n’a que douze ans d’âge, et se différencie par une bouteille trapue qui ne ressemble à aucune autre, notamment par l’emploi d’un verre brun craquelé. En single malt, Glendullan n’a été longtemps commercialisé qu’en 12 ans d’âge, dans la gamme Flora & Fauna de Diageo, ainsi que quelques éditions limitées de malts âgés, comme le 26 ans lancé en 1995 dans la série des Rare Malts.
Mais, en 2007, Diageo crée la surprise en lançant The Singleton, une marque unique… pour trois de ses malts : Glendullan, Dufftown et Glen Ord.
C’est totalement inédit et, en même temps, pour le moins curieux, voire bizarre. Car le mot singleton désigne, en mathématique, un ensemble ne comportant qu’un seul élément ou, au bridge, le fait de ne détenir en main qu’une seule carte dans une des quatre couleurs. Là, il existe donc trois malts sous un même nom ! Diageo aurait-il voulu nous refaire le coup de la Sainte-Trinité ?
Les deux premiers se situent dans le Speyside, alors que Glen Ord vient des Highlands du Nord, et, sans qu’aucun ne soit tourbé, ces trois malts ne sont tout de même pas identiques.
Au départ, les trois Singleton sont affectés à des marchés différents : Glendullan pour les Etats-Unis, Dufftown en duty free puis au Royaume-Uni, Glen Ord en Asie. Mais, depuis 2015, ces restrictions ne sont plus en vigueur, et les trois sont disponibles plus ou moins partout.
Par ailleurs, chaque Singleton connaît plusieurs déclinaisons en âge ou en appellation. Ainsi, Glendullan a été décliné un temps en Liberty et Trinité (tiens… tiens…) pour le duty free, et existe maintenant sous les appellations Classic (vieilli en fût de chêne américain), Double Matured (chêne américain et chêne européen ensuite assemblés) et Master’s Art (finition en fût de muscat). Il y a eu aussi un 38 ans d’âge commercialisé en 2014.
Grâce à la force de frappe commerciale de Diageo, The Singleton est rapidement devenu un gros succès, car il a atteint en 2015 la 5e place des single malts les plus vendus dans le monde, juste derrière Glenmorangie, avec 5,4 % de part de marché.
Pour le Clan, j’ai dégusté trois Glendullan en tout et pour tout, dont très récemment le 19 ans à 53,4°. Sans être d’une folle originalité, ils ont développé généralement une belle puissance, comme le 32 ans à 48,1°, alliant le floral, les fruits jaunes et de belles notes épicées.l102-10

Les distilleries de A à Z