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A NOS CHÈRES DISPARUES

Lu dans le journal d’André Gide à propos du journal de jules Renard «  Ce n’est pas un fleuve, c’est une distillerie ».

« Que sont mes amis devenus
Que j’avais de si près tenus
Et tant aimés… »

Ce que disait le poète RUTEBEUF au 13ème siècle, pourrions-nous l’interpréter à propos de toutes ces distilleries qui ne nous laissent que d’émouvants souvenirs ?

Banff, Glenglassaugh, Rosebank, Saint Magdelene, Glendullan ou Port Ellen. En citant ces distilleries, c’est autant de bons moments évoqués, lorsque nous découvrions distraits ou recueillis ces témoins d’un passé récent pour nous, mais déjà d’un âge vénérable pour ces eaux de vie. C’était le plus souvent sans connaître leur destin.

Certaines de ces belles ne sont qu’endormies, pensons à Scapa, Glen Keith, Caperdonich ou Imperial, et reverront peut-être le jour comme Glengyle à Campbeltown ou Octomore dans Islay. Tout est là pour qu’elles se réveillent depuis les bâtiments, les équipements et bien sûr les stocks, sans qui tout serait vain. C’est le marché qui décidera, et le prince charmant qui s’appelle maintenant Diageo, Allied Distillers ou Ricard (cœur de lion), question d’époque….

D’autres ont eu moins de chance : Chartershall, Littlemill, Carsebridge et Saint Magdelene, Cannonmills, Glenochil mais aussi Banff, North Port et Pittyvaich et d’autres encore maintenant détruites. Qui se souviendra d’elles dans quelques années, certaines déjà oubliées, d’autres encore présentes au travers de rares flacons. Vous aurez eu la chance de connaître un certain nombre d’entre-elles (et pas des moindres), lors de certaines de nos soirées, et il reste encore heureusement au Clan des opportunités pour les collectionneurs !

Au hasard de vos ballades en Ecosse, vous verrez peut-être encore des bâtiments n’abritant plus que les fantômes du passé. Ces distilleries démantelées sont vides, c’est le cas de Stratheden, Rosebank ou Boningtown. Les stocks ont été dispersés, les installations démontées et ne reste que le site, de vieilles architectures plus ou moins conservées et parfois le souvenir de bien belles choses. Vous avez dit Rosebank ?

Encore plus nombreuses sont les distilleries fermées, ailleurs dédiées à d’autres activités, (voyez Port Ellen qui produit le malt tourbé pour l’ensemble de l’Ile), ou parfois déplacées comme Ardmore. Glendullan, Nevis, Glenglassaugh ne produiront plus, les chais de certaines sont parfois encore utilisés pour le vieillissement de certains whiskies, d’autres font visiter leurs installations à des escadrons de touristes dans le meilleurs des cas !

Enfin toutes celles qui sont oubliées, dont on a perdu jusqu’au nom. Reste parfois le souvenir de leur emplacement, d’un lieu-dit, un nom, une date de création, le patronyme de leur propriétaire dont a perdu la trace, Wellfield, Meadow, Irvine, Blackburn, Kirkwall, Middletown, tout ces noms ancrés dans la mémoire Ecossaise…

Une année riche de découvertes va s’achever, Noël approche, si notre propos entraîne une certaine nostalgie, pensez à ces pépites, à ces anciens goûts, à ces joyaux que vous ne reverrez plus, étonnez vos amis !

Slainte

Gérard TRENTESAUX

LE CLAN, UNE CERTAINE IDÉE DU BON GOÛT ?

Janvier déjà, après la période convenue des vœux, après les échanges de cadeaux modestes ou somptueux, après des agapes plus ou moins raisonnables, vous pensiez peut-être : « ça y est, c’est terminé pour cette année ! » et si vous avez cru pouvoir y échapper, le temps vous rattrape et notre lettre est là pour vous le rappeler, puisqu’elle devrait vous parvenir avant le 14 février, ( croisons les doigts…) jour de la Saint Valentin.

Selon que nous soyons d’incorrigibles optimistes ou de fâcheux atrabilaires, nous dirons qu’elle parait trop tôt ou trop tard et n’a eu jusqu’ici aucune difficulté à éviter des dates par trop rituelles comme un 5 bimestriel ! Sa sortie restera donc jusqu’ici inattendue et pleine de fantaisie en dépit de notre acharnement à respecter le temps, celui-ci restant comme d’autres choses plus difficile à gagner qu’à dépenser. Heureusement la ponctualité n’est pas sa raison d’être, mais c’est bien de proposer à vos palais insatiables, des perles, des raretés, des nouveautés, des whiskies insolites, des exclusivités, des finitions originales, dénichées par notre ami François Xavier Dugas et testées au cours de longues soirées de travail….., soucieux que nous sommes de distinguer la qualité du luxe.

Dans l’univers des produits hauts de gamme, la stratégie de Premiumisation, charmant néologisme ignoré du Larousse, nous propose des produits Premium, des super Premium et même des ultra Premium ! produits parfaitement calibrés nécessitant une production et une distribution dont les limites sont toujours repoussées. Le Clan ayant encore une certaine idée du bon goût, nous pourrons, et espérons-le longtemps, y échapper.

Si ce n’est déjà plus la période des vœux, c’est encore celle des projets.
Sachant que les échanges nous enrichissent, que la perception est différente pour chacun d’entre nous, que nous pouvons disserter à l’infini sur le mystère de la personnalité de tel ou tel whisky ou sur l’esthétique de tel autre, l’une de nos préoccupations est de vous proposer bientôt, avec l’aide incontournable de Gilbert Delos, des fiches de dégustation vous permettant de noter vos impressions à partir des éléments qui seront suggérés, et pour que tout cela ne reste pas éphémère….dans un élégant classeur personnel.

Le petit monde des amateurs de whiskies se retrouve souvent au sein de clubs de dégustation dont l’expertise est parfois remarquable, nous souhaitons très bientôt établir des liens avec certains d’entre eux afin de voir ce que nos expériences peuvent nous apporter réciproquement et ce que notre passion commune pourrait nous faire partager.

L’intérêt que vous portez aux whiskies sélectionnés et aux dégustations qui permettent de les découvrir est sans doute à l’origine de toutes les nouvelles initiatives de cette année pour créer de nouveaux lieux de dégustation, Jean Pierre Bristow à Tours, Jean-Claude Cossart à Calais, Hervé Colozier à Monaco, et encore en projet, Orléans, Lagny, Tournai, La Baule, bon courage à tous!

Enfin, le Clan ne serait plus le Clan si quelques uns d’entre-vous ne pouvaient pas s’échapper pour quelques jours vers ces contrées exotiques et proches malgré tout et dans lesquelles un toit pagode, des chais, un nom évocateur, sont autant de témoignages du passé et du présent, ces lieux où flotte encore le souvenir de Gilles notre ami. Nous espérons vous proposer bientôt et probablement pour l’automne un de ces voyages insolites.

Mais revenons à notre point de départ : la Saint Valentin, tradition de notre lointain Moyen-Age, jour encore de cadeaux et de témoignages d’affection que partage aussi bien le Japon, la Chine, l’Europe ou l’Inde encore, alors pourquoi pas un dram du Clan pour votre préféré(e) ?

Slainte

Gérard TRENTESAUX

QUE D’EAU, QUE D’EAU…

Une fois n’est pas coutume, sans doute inspirés par cet été arrosé, nous ne parlerons pas de whisky, mais d’eau.

Si l’élaboration du whisky de malt par le mystère de son alchimie nous fait rêver, l’eau le plus souvent se fait discrète. Pourtant cette indispensable compagne est toujours là lors des différents stades de sa création, de la genèse de cette « water of life » à son accomplissement dans notre verre. Depuis les monts enneigés jusqu’aux landes brumeuses, surgissant des lochs, sources et burns, elle accueille les distilleries au fond des vallons ou au bord des collines et leur apporte souvent leur nom de baptême. Rêvons déjà.

Entre vérité et légende, entre légende et superstition, les distilleries de malt sont fières de leur source, les parant de toutes les qualités qui feront leurs futurs whiskies. Chaque distillerie va se trouver près d’une bonne source d’eau douce, pure et généreuse, sur laquelle elle veille jalousement. Cette eau n’a pas besoin d’être potable, les rares impuretés ne résisteront pas à la double distillation ! Le plus souvent c’est une eau douce peu minéralisée, glissant sur des roches volcaniques et se chargeant des caractères du terrain traversé, tourbes et végétaux, bruyères, ajoncs et fougères. Ailleurs comme chez Highland Park ou Glenmorrangie, l’eau est dite dure, riche en sels minéraux, calcium, magnésium, fer, zinc, ayant dissous les roches qu’elle parcourait. Pour l’une, meilleur solvant pour l’extraction des substances au cours du brassage, pour l’autre, ses minéraux favorisant la qualité de la fermentation. Le thé et la bière sont là pour l’attester. Rêvons encore.

Rappelez vous Bourvil dans son inoubliable causerie anti-alcoolique :

«  L’alcool non, mais l’eau ferru, l’eau ferrugineuse, oui!
L’eau ferrugineuse, comme son nom l’indique, contient du fer, et le dire c’est bien mais le faire, c’est mieux…
Et pourquoi y-a-t-il du fer dans l’alcool ? Parce que l’eau a passé et repassé sur le fer, et le fer a dissout ( le fer à dix sous, c’est pas cher, hein ? ) »

Etc, etc…
Mais l’eau ne ferait-elle que passer et que restera-t-il de tout cela ? Notre eau déborde d’activité pendant l’élaboration du whisky, permettant à l’orge de germer lors du trempage, chauffée ensuite à différentes températures, aidée des diastases elle extrait les sucres de l’amidon dans les mashtuns, se rend indispensable lors de la fermentation dans les washbacks, puis va devoir affronter les alambics. Là c’est une certitude, les sels minéraux disparaîtrons, mais qu’en est-il des saveurs volatiles dont elle s’était chargée…

Elle est toujours là pour le refroidissement des serpentins, mais c’est le plus souvent l’eau modeste des mares alentours…. Vient enfin le stade d’une première réduction de 70° à 63,5° avant la mise en fût, rarement avec l’eau de la source mais par addition d’eau distillée, celle-ci n’apportant que sa présence inerte et sans mémoire. Pendant le vieillissement, par l’évaporation, la perte en alcool, l’humidité des chais, la qualité des fûts, l’eau n’est pas vraiment en sommeil. Vient enfin le temps de l’embouteillage, ou notre whisky subira la plupart du temps une nouvelle réduction, 46°, 43°,40°, stop, arrêtons le massacre. Certains lots de celui-ci échappant heureusement à ce traitement pour notre plus grand plaisir !

Imaginons que l’eau influence notre whisky, que reste-t-il alors de notre source ? Il faut encore rêver. Voici le temps de la dégustation, et comme l’on sait le whisky est soluble dans l’eau, même si certains y voient un crime! Si c’est votre choix ( et sous votre responsabilité), n’allons surtout pas y mettre l’eau chlorée du robinet mais quelques gouttes d’une eau minérale neutre, et pourquoi pas d’une source Ecossaise, non gazeuse cela va de soi, un peu rafraîchie, qui vont stimuler les arômes, libérer des arômes secondaires, et atténuer l’agressivité de l’alcool. Mais parfois attention à la casse, la dilution d’un cask strenght peut être catastrophique, destructeur sur des whiskies boisés ou marqué par le sherry, ou inconcevable avec la finesse de certains Speyside.

Chaque whisky est unique, respectons-le.

Slainthe.

Gérard TRENTESAUX

PARCOURS D’UN HOMME BIEN

Il y a quelques semaines nous étions à Marseille, et pendant quelques heures le restaurant des Arcenaulx fut le centre du Clan. Avec Gilles, nous en avions eu l’idée pour joindre et rencontrer nos amis du midi, et maintenir ce lien entre nos adhérents venant d’horizons divers, le Nord était présent, la Bretagne, la Suisse, Paris et l’Ile de France bien sûr.

Pendant cette Assemblée Générale nous faisions le bilan de l’année et de nos dix ans d’existence, au cours desquelles il fut toujours présent. Mais ce soir-là Gilles n’était pas là. Comme Cyrano manquant son rendez-vous avec Roxane, il manquait de force pour participer à ce rendez-vous.

En mai, courageux et opiniâtre, il voulut encore accompagner un groupe de cavistes au Etats-Unis, clients devenus pour beaucoup ses amis, dans un périple qu’il avait découvert deux ans auparavant, préparé minutieusement, et coaché avec un inimitable enthousiasme pour le Clan. Même épuisé cela avait du sens pour lui. Hospitalisé dès son retour, et quelques heures avant qu’il ne nous quitte, il vérifiait encore les moindres détails du voyage pour le festival d’Islay qu’il savait ne pas revoir. Que dire de plus. Au travers de ces derniers moments transparaissait les plus évidentes de ses qualités.

L’histoire du Clan des Grands Malts est indissociable de l’engagement de Gilles, il fut de nos toutes premières réunions où nous doutions de notre avenir. En se penchant sur le berceau du Clan, il voulait assurer son succès. Sa passion des voyages l’amenait tout naturellement à préparer les premiers séjours en Ecosse pour le Clan, n’étions-nous pas déjà en novembre 97 aux Orcades pour découvrir Scapa et Highland Park, ce voyage plein d’imprévus où nous mesurions déjà sa capacité d’adaptation, sa réactivité et son inépuisable bonne humeur qui nous laisse des souvenirs inoubliables.
Puis ce furent les différentes régions d’Ecosse, L’Irlande bien sûr, les Etats-Unis, le Japon, mais aussi le Portugal et la vallée du Douro, et encore l’Espagne et Jérès de la Frontera.
Sa passion du whisky l’amène ainsi à tisser un réseau inégalable de contacts dans les distilleries, transformant les voyages en expériences originales et atypiques, hors des sentiers battus. C’est ainsi qu’il voyait les choses.

Son exigence sur la qualité et le choix des produits maintenait une pression constante sur notre ami François-Xavier Dugas, pour le Clan il voulait du bon du rare et du précieux, et pourquoi pas dénicher de temps à autre au fond d’un chai « le fût » pour notre plaisir à tous.
Aimer ses amis, vivre ses passions, prendre des risques, c’était Gilles.
Personnalité riche, nous sommes honorés de l’avoir côtoyé, nous l’évoquerons souvent, il laisse une trace forte parmi nous.

Gérard TRENTESAUX

L’ASSEMBLAGE DANS TOUT SES ÉTATS

Dans l’art du Patchwork il s’agit pour l’artiste d’assembler d’anciennes pièces de tissus afin de réaliser par l’harmonie des lignes et des couleurs d’admirables compositions sublimant le caractère utilitaire auquel leurs origines modestes les destinaient.
Un assemblage hasardeux n’aurait qu’un déplorable effet esthétique, et les traditions discrètes mais évidentes guident encore les doigts de nos artistes contemporains vers un quilting plein de poésie.

Que serait la peinture sans le mélange inspiré, magique, variable à l’infini du bleu, du rouge, du jaune, recréant la lumière…
Cet exercice de métissage s’adresse aussi à d’autres sens, le goût et l’odorat, quand là aussi nos aînés, nos ancêtres, dépassèrent nos satisfactions vulgaires pour aller vers plus de sensations hédonistes.

Le champagne selon telle ou telle maison marie le vineux Pinot noir, l’élégant Chardonnay, parfois le Pinot Meunier, pour obtenir un style reconnaissable, une originalité qui le distingue.

En Châteauneuf le vigneron réalise de minutieux assemblages avec une palette de plus de dix cépages différents pour réaliser ce vin d’une splendide complexité.

Si le single cask ( embouteillage d’un seul fût ) au degré naturel reste un must pour nos palais exigeants, l’expérience gustative retirée de l’alchimie que réalise le distillat, le bois et le souvenir aromatique d’un contenu éphémère reste unique et, bonne ou mauvaise, celle-ci est sans lendemain. Original et singulier il reste confidentiel ( sauf au Clan des Grands Malts…).

Mais l’art de l’assemblage n’a-t-il pas trouvé de meilleur terreau que dans le whisky, tout d’abord au travers des blends à partir de 1860, puis un siècle plus tard avec l’évolution du goût vers les Single malts, dans des whiskies millésimés ou des versions d’age.

Alcool obtenu par la distillation d’une bière, au début mélange de céréales en excédent auxquelles on ajoutait des aromates et des épices, pendant longtemps ce furent des mélanges hasardeux d’alcools de céréales parfois différents. Au nord de la Highland Line des whiskies à base de malt, d’orge non malté, parfois de froment, au sud des whiskies de grains de médiocre qualité pour l’essentiel, rectifié et transformé en Gin.

D’abord les malts agricoles du nord de l’Ecosse, puissants et rustiques, furent assemblés en vatted malts dans les épiceries de commerçants devenus célèbres tels que John Dewar, Johnnie Walker, Berry Brothers ou encore Georges Ballantine, créant les premières marques et annonçant les whiskies modernes .

Puis déjà vers 1850 des assemblages de whiskies d’âges différents provenant de la même distillerie furent réalisés en entrepôts. Enfin, l’élaboration des blends mettait fin à des décennies de production de produits douteux, donnant un gage de qualité, rendant l’approche plus facile et le prix plus accessible que les whiskies de malt, à l’évidence au commencement d’une autre époque. Actuellement les meilleurs blends peuvent être des produits tout à fait respectables, selon la proportion de malts de qualité qu’ils contiennent et le sérieux de leur vieillissement.

Les single malts millésimés (le millésime étant l’année de distillation ), ceux qui, contrairement aux humains arborent fièrement leur age (celui-ci étant l’age du plus jeune fût entrant dans sa composition) résultent d’un savant dosage entre les fûts. Prenant chez chacun d’eux ce qu’il a de meilleur, l’ assembleur  sélectionne parfois jusqu’à cinquante fûts pour réaliser son « produit ». Sans son expertise et l’expérience, le résultat pourrait être médiocre…. Ces assemblages dans leurs multiples facettes, variables à l’infini mais aussi le fruit de  recettes précises ( et tenues secrètes), réalisent les conditions de produits constants, équilibrés, et comme l’énergie, longtemps renouvelables !

Dans tout cela ce qui est bon est bon, à la fois simple et compliqué, et encore pour longtemps, espérons-le, le fruit du travail des hommes.

Gérard TRENTESAUX Président

L’ART ET LA MANIÈRE

« Le whisky est un traitement pour lequel il n’y a pas de maladie »
John Fergus

Sans doute l’usage des vertus médicinales de l’usquebaugh fut longtemps la priorité des moines. Puis, les chirurgiens-barbiers d’Edimbourg eurent à l’aube du 16ème siècle le privilège et l’exclusivité de la distillation et de la vente de l’eau de vie. Mais mon Dieu, qu’en faisaient-ils? Ces potions agricoles et rudimentaires devaient être probablement imbuvables!
Et jusque-là l’engouement récent pour les single malts et leurs multiples facettes, la notion de dégustation n’était que symbolique.

Si déguster est un des bons plaisirs de l’existence, alors n’épuisons jamais ce sujet , le pourquoi et le comment de la dégustation, tant il est vrai que c’est une manière de mêler le passé au présent, le présent à l’avenir, l’amateur n’aimant rien autant que d’évoquer ses découvertes passées et de se projeter vers d’autres expériences. L’occasion aussi d’échanger entre partenaires d’une même passion, de comparer nos impressions, de découvrir la subjectivité de nos commentaires.

Fumeurs de cigares, goûteurs de thés, fanatiques des huiles d’olive, croqueurs de chocolat, fervents de réunions œnologiques, c’est le plus souvent au sein de clubs qu’ils s’expriment et nous ne faisons pas exception. Nos collègues, tout comme nous, vont appeler leurs différents sens avec souvent une curieuse similitude de termes pour communiquer leurs impressions. La vue d’abord pour décrire la couleur, l’aspect, le corps, l’odorat ensuite pour les sensations et les différents arômes primaires puis secondaires, le goût enfin pour la texture, les saveurs, l’équilibre, reflet d’une sensation d’harmonie, et la finale enfin restant comme un écho de tout ce qui précède. Ce n’est pas par hasard que l’on emploiera souvent les uns et les autres des termes empreints d’une certaine sensualité : le nez, le corps, la jambe, le gras, la bouche….toutes choses qui ont du sens même si le sens n’est plus le même.

Mais si les réunions organisées par nos clubs sont des endroits privilégiés pour faire des découvertes, rencontrer des amateurs expérimentés, y recueillir des commentaires pointus, il reste une place bien sûr pour organiser des réunions privées.
Sans doute pour réussir une dégustation faut-il, pour l’agrément et la convivialité, réunir quelques amis et autres amateurs autour de soi, disons entre deux et trente….disposer d’un endroit sympathique où l’on pourra se détendre debout ou assis (doit-on en bannir les fumeurs ?), préparer des verres à Armagnac ou des « copitas » à Xérès, d’une transparence exemplaire, qui heureusement ne laissent pas de place pour de la glace, mais permettrons de mieux concentrer les arômes de nos breuvages et d’y plonger notre nez avec élégance! De prévoir cependant une eau neutre et fraîche, peu minéralisée, non gazeuse bien sûr, à la fois pour diluer (raisonnablement) nos eaux-de-vie, comme le font beaucoup de professionnels et la plupart des Ecossais , éviter la brûlure de l’alcool  et ouvrir ainsi la palette des arômes volatils . Et puis bien sûr, pour se refaire la bouche entre deux whiskies ! Sélectionner trois ou quatre versions d’une même distillerie (verticale) ou bien des produits issus de régions différentes choisies pour leur caractéristiques originales . Certains, et beaucoup d’entre-nous, préférerons le whisky « sec »( doux euphémisme pour un liquide…) ou le choc avec le degré naturel d’un whisky non réduit dégusté à très petites gorgées, appréciant ses arômes, mais aussi ses « effets »! Somme toute, si l’on respecte certaines recommandations, dégustons nos whiskies comme bon nous semble.

Et maintenant, Slainte Mhath

Gérard TRENTESAUX

UNE SEULE LETTRE NOUS MANQUE…ET TOUT EST DÉPEUPLÉ

Parodions ce cher Lamartine pour évoquer le feuilleton de l’été : pas de lettre, pas de site ! Chaque parution permet aux membres proches ou éloignés de recevoir les témoignages de nos activités au travers des relations de voyage et des compte-rendus de nos différentes dégustations, et bien sûr de se pencher sur les commentaires de nos dernières sélections. Qu’on le veuille ou non, la lettre du Clan est le lien indispensable entre ses adhérents, mais sa parution ne résiste pas toujours aux vicissitudes du temps qui passe…

Lors de nos premiers balbutiements en 1997, elle se limitait à quatre recto-verso pour devenir progressivement un bulletin de seize pages. En octobre 2002, tout en préservant son style, soucieux de rendre sa lecture plus agréable, nous avons modifié la ligne graphique et la présentation des whiskies avec un classement par régions et un tableau de synthèse. La dernière formule de présentation fut proposée il y a deux ans, et chaque évolution fut le résultat de nombreuses réunions tardives et animées…

Il nous semblait maintenant que la lettre gagnerait à plus de lisibilité en aérant certains articles, en particulier la sélection, et cette réflexion est à l’origine de notre retard, celui-ci s’est amplifié pour des problèmes d’impression, puis de livraison ! Tout s’enchaînait pour que nous ne puissions pas vous faire parvenir la lettre 50 dans des délais raisonnables.

Un malheur n’arrivant jamais seul, notre site www.grandsmalts.com, complémentaire du bulletin, pour des problèmes techniques n’était plus accessible depuis plusieurs semaines. Il n’avait pas disparu bien au contraire, notre Webmestre Bruno Guibert nous a concocté une nouvelle version dans sa marmite informatique, et dans sa grande sagesse a changé d’hébergeur pour des problèmes de sécurité ( les initiés comprendront ). Notre site peut être à nouveau consulté sur la toile à l’adresse suivante : www.grandsmalts.fr

Au chapitre des bonnes nouvelles, la Fête du Malt aura lieu le samedi 14 octobre 2006 à Paris. Pour sa dixième année le Clan souhaite préparer une soirée mémorable sur l’organisation de laquelle vous recevrez prochainement un courrier, nous espérons que vous serez comme tous les ans nombreux à participer avec vos amis. A vos agendas !

Puis les 24 et 25 novembre le Clan des Grands Malts sera présent à la première édition du « Grand Testing » au Carrousel du Louvre, l’évènement de l’automne pour les amoureux de vins et eaux-de-vie d’exception.
Autre bonne nouvelle, le siège du Clan est ouvert au 78 avenue des Terroirs de France, nous y disposerons d’une sélection de whiskies pour des envies pressantes ou des besoins urgents…Pour nous appeler : 01 43 43 60 15.

Il nous reste à souhaiter que vous avez passé de bonnes vacances… et fait de bonnes découvertes maltées entre amis !

Gérard TRENTESAUX

LE BONHEUR EST DANS LE FÛT

Une verticale SPRINGBANK ? Pour un non initié ce pourrait être une nouvelle voie d’escalade, mais voilà, pour les amateurs que nous sommes il y avait de quoi exciter plus d’un palais, même si la notion d’escalade n’est pas exclue de nos agapes.

Imaginez mon cousin : trente cinq personnes à Lille, plus de cent à Paris, pour ce qui fut les 7 et 8 juillet une des plus belles dégustation de l’année. Hélas nous dûmes refuser du monde tant à Lille qu’à Paris !

Le 8, jusqu’au dernier moment nous espérions contrôler les éléments, et nous réunir sur la terrasse verdoyante et ombragée du restaurant du stade Jean Bouin. Et pourtant rien n’y fit, les orages, redoublant de violence, nous ont contraints à nous réfugier dans la salle de restaurant initialement prévue pour 80 personnes ! Angoissés nous fûmes, jusqu’à ce que notre hôte Didier DELU trouve la solution en réaménageant la salle avec hardiesse et professionnalisme.

Nous avions le privilège d’accueillir Kate WRIGHT responsable de l’export pour la distillerie SPRINGBANK, et qui cédant à nos sollicitations, était venue avec quelques exclusivités dans ses bagages. Pensez : un LONGROW 13 ans, tourbé bien sûr, puissant et remarquablement harmonieux, qui ne fera sa première apparition en public qu’à l’automne, un HAZELBURN brut de fût distillé en 97, dominé par les agrumes, et restera encore dans les langes pendant un an, un SPRINGBANK 14 ans au degré naturel, avec une finition en fût de rhum (qui disait que chez Springbank on ne connaissait que le Bourbon barrel ?) Il n’y aurait eu évidemment pas de verticale si un SPRINGBANK 15 ans à 46 %. (Bientôt disponible au Clan- premier scoop-) et un grand, que dis-je grand, énorme SPRINGBANK 28 ans (Encore disponible……au clan ) n’avaient pas été de la fête.

Parmi nous ce soir là, Martine NOUET, écrivain, journaliste, auteur entre autres du très beau « les routes du Whisky », et entre autre grande prêtresse de la cuisine au whisky, testant tout au long de la soirée ces fioles avec une joyeuse gourmandise, et bien sûr Gilbert DELOS, également journaliste et écrivain, dont les subtiles commentaires nous font toujours découvrir de nouvelles choses au fond de notre verre.

Tout au long de la soirée Kate pu nous parler de l’originalité de cette distillerie mythique du Kintyre, seule survivante avec GLEN SCOTIA d’une période pléthorique où la presqu’île comptait jusqu’à 30 distilleries ! SPRINGBANK reste une distillerie artisanale, perpétuant la tradition des distilleries « de ferme » : là où quatre à cinq personnes suffisent pour faire fonctionner une distillerie « high tech » presque entièrement automatisée, quinze personnes sont nécessaires chez Springbank pour la distillation, l’embouteillage et la tonnellerie (Quelques douelles à rajouter de ci de là sur ces étranges cuves en bois que l’on se cède, s’échange, que l’on répare de par le monde!).
Propriété de la famille Mitchell depuis sa création en 1828, elle produit les whiskies Springbank, Longrow et Hazelburn (depuis 97). Preuve de son remarquable dynamisme, après avoir aidé au redémarrage de Glen Scotia, elle s’apprête à remettre en production la distillerie GLENGYLE, située à un jet de pierre (c’est presqu’île scoop !) qui fut fermée en 1925, et nous donne rendez-vous en 2014 pour les premiers embouteillages !

Quelle belle soirée…..

Gérard TRENTESAUX

Faites votre choix !

LA REGION D’ORIGINE :
Whisky Irlandais, Bourbon, whisky Japonais, canadian whisky, Scotch whisky, signifie obligatoirement distillé et vieilli dans l’une de ces régions. Le terme « whisky » venant du latin acqua vitae, eau de vie, traduit en Gaélique par « usquebaugh ».

Pour pouvoir porter l’appellation « SCOTCH WHISKY » le produit doit avoir été élaboré en Ecosse, à partir d’eau et d’orge maltée, par le procédé Pot Still (malt whisky), ou d’orge malté à laquelle sont ajoutées d’autres céréales, ou encore de celles-ci ( blé, maïs) sans orge par le procédé Patent Still (grain whisky).Suivent les conditions de fabrication du moût, de fermentation, de distillation, de vieillissement (Celui-ci doit être au minimum de trois ans), et auquel on ne pourra rajouter que de l’eau…et éventuellement de l’essence de caramel (pour la coloration !). S’il s’agit de la couleur liée au fût, cette indication « not colored » sera le plus souvent notée.

LE NOM :
Nom de marques pour les whiskies les plus courants, Johnny Walker, Ballantines, Cutty Sark, Clan Campbell, Famous Grouse, etc, qui représentent encore plus de 90 p 100 de la production. Se sont des «  BLENDED SCOTCH WHISKY », blended signifiant un assemblage de whiskies de malt (orge malté) et de différentes céréales (blé et maïs), mais étant tous des scotch whiskies en proportions variables, pouvant aller jusqu’à cinquante whiskies différents, garantissant une qualité et un goût constant, en principe reconnaissable…..Cette technique mise au point vers 1860 à Edimbourg, va permettre d’étendre la réputation et la diffusion de ces produits dans le monde. Ces whiskies subissent une filtration à froid afin de rester limpides en toutes circonstances. Ils sont en général réduits à 40% alc/ vol. voire 43% par addition d’eau.

Un VATTED MALT désigne un assemblage de whiskies de malt exclusivement, mais provenant de plusieurs distilleries apportant chacune leur style. Ce n’est donc ni un blend ni un single….mais un produit constant, sans aucun doute introduction à l’univers du malt.
Nom de la distillerie d’origine pour l’élite des whiskies, plus récents dans leur diffusion, qui précèdera en général l’appellation SINGLE MALT et provient obligatoirement d’une seule distillerie, mais étant le plus souvent le résultat au sein de cette distillerie d’un assemblage pouvant aller jusqu’à une centaine de fûts, donc de bois différents. Un PURE MALT désigne tantôt un single tantôt un vatted…
Suit alors la région d’Ecosse dans laquelle se situe cette distillerie : ISLAY, LOWLAND ,HIGHLAND, SPEYSIDE.

L’AGE :
L’indication de l’age de vieillissement correspond à l’age du distillat le plus jeune entrant dans sa composition, ceci pour les blended et les assemblages.
Le Single cask sera par contre assorti d’une date de distillation, et d’une date de mise en bouteille (BOTTLED), au-delà de laquelle cette eau-de-vie n’évoluera plus (si la bouteille n’a pas été ouverte !).

LES SPECIFICITES :
Un SINGLE CASK provient d’un fût unique et l’on trouvera en général une autre indication renseignant sur l’origine du fût : sherry wood ou sherry butt, bourbon hogshead ou barrel (selon le volume et l’origine du cask), porto cask, double maturation, rum finish par exemple (lorsque la finition se fait dans un fût différent de celui d’origine).

La contenance du fût en nombre de bouteilles est également indiquée, ainsi que le n° du fût.
Enfin ce whisky peut-être réduit ou non réduit, filtré ou non filtré. Non réduit il portera la mention « cask strength », non filtré, l’indication « not chill filtered ».

Le degré est indiqué en bas à droite ou en bas à gauche…
La réduction par ajout d’eau de source, s’étend en général de 46 à 40% alc/ vol (ou degré). Cette notation remplace l’ancienne indication Anglaise « proof strength » (degré prouvé) dont l’explication nécessiterait l’ensemble de cette colonne !

CASK STRENGTH désigne le degré naturel, c’est-à-dire le degré de l’eau-de-vie au moment de l’embouteillage, ce qui va dépendre du vieillissement, du fût, des conditions de stockage, humidité et température, et peut être attribué à un single cask, ou un assemblage.
Dans ces whiskies haut de gamme, l’étiquette porte aussi le nom de l’embouteilleur, soit que l’embouteillage ai lieu directement à la distillerie pour quelques unes encore, soit chez un embouteilleur indépendant de la distillerie : CADENHEAD, IAN MAC LEOD (Chiftain’s), GORDON MACPHAIL, SIGNATORY, WHISKY CONNOISSEUR par exemple, dont la réputation est souvent liée à la qualité de leurs choix, et sans lesquels nous n’aurions pas, hélas, accès à la plupart des single malts.

L’absence de filtration à froid NOT CHILL FILTERED, maintien en suspension d’infimes particules, préservant certains éléments aromatiques, la filtration par contre évite le trouble qui se produirait par refroidissement ou ajout d’eau.

Et maintenant, bon choix et bonne dégustation !

QUE DE BREUVAGES !

Certes, nous pouvons rester en toutes saisons, et en toutes circonstances les inconditionnels du Single-Single et du cask strengh, sans eau bien sûr,(et sans glace, cela va sans dire !).
Cependant c’est l’été, et j’ai été sollicité pour vous proposer quelques recettes dont les variations font intervenir votre boisson favorite, et ceci pour accompagner, bien sûr, un buffet à l’anglaise, avec quelques amis.
Si l’on est un inconditionnel d’Astérix, et ne pas faire de fastidieuses recherches bibliographiques, c’est évidemment dans la potion magique qu’il faudrait rechercher l’origine du cocktail.
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