Les secrets de l’élaboration

Comme de la bière

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La première phase de l’élaboration du whisky est tout à fait identique à celle pratiquée par les brasseurs de bière. Concassées, c’est-à-dire moulues d’une manière grossière, les céréales maltées vont d’abord passer par l’étape du brassage.

Appelée «grist», cette farine est mélangée à de l’eau chaude (65° C en général), souvent en plusieurs étapes, dans de grandes cuves équipées de pales agitatrices. L’opération est répétée deux, voire trois fois, afin d’extraire le maximum de sucre des céréales.

Après filtration, on obtient le «wort», un moût sucré très dense. Le résidu des céréales, est souvent vendu aux agriculteurs pour l’alimentation des bovins. De la densité en sucres du wort va dépendre le pourcentage d’alcool obtenu par distillation, et c’est pourquoi elle est soigneusement mesurée, y compris par les agents des services fiscaux, pour éviter toute fraude par la suite !

Par contre, le wort ne connaît ni le houblonnage ni l’ébullition pratiqués en brasserie.

La fermentation

Une fois refroidi, le wort est mis à fermenter avec des levures, identiques à celles utilisées en brasserie, ou spécifiques à la distillerie. Sous l’action des levures, les sucres se transforment en alcool, en gaz carbonique et en chaleur. Cette étape suivie avec beaucoup de précautions : il ne faut que la cuve déborde, ni que la chaleur devienne trop importante : si elle dépassait 35° C, elle tuerait les levures avant que la fermentation ne soit terminée.

L’opération, qui prend deux à trois jours en moyenne, est réalisée dans de grandes cuves ouvertes 10 000 à 20 000 litres, les «washbacks». Elles étaient autrefois en mélèze d’Écosse ou en pin d’Orégon, mais sont de plus en plus souvent en inox, qui a l’avantage d’être inaltérable. Les distillateurs les plus fidèles aux traditions préfèrent toujours le bois, censé apporter des arômes spécifiques. Le liquide obtenu titre entre 8 et 10 % d’alcool.

Appelée «wash», Il porte également le nom de «bière verte» dans les distilleries écossaises. Du point de vue du degré alcoolique comme du taux d’acidité, le wash est proche des vins utilisés pour obtenir le cognac ou l’armagnac. Le wash n’est jamais filtré avant distillation, du moins dans l’élaboration des single malts de type écossais, afin de conserver ses qualités aromatiques.

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À «repasse» ou à «colonne»

Deux types de distillation, et donc d’alambics, sont utilisés pour produire du whisky. La plus ancienne, dite «à repasse», s’opère en deux temps. Cette méthode est utilisée pour l’élaboration de nombreuses autres eaux-de-vie, comme le cognac, l’armagnac, le calvados, etc. Le chauffage, autrefois à feu nu (bois, charbon, voire gaz) est de plus en plus souvent assuré par des systèmes à vapeur. Une méthode plus économique, mais qui a peut-être l’inconvénient d’empêcher une discrète caramélisation de l’eau-de-vie, génératrice d’une certaine richesse aromatique.

Dans le système à repasse, le moût est porté à ébullition dans un premier alambic en cuivre, et les vapeurs d’alcool qui s’en dégagent, montent jusqu’à un condenseur (ou serpentin) refroidi à l’eau, donnant un liquide alcoolisé d’environ 25 à 28°. Cet alcool passe alors dans un deuxième alambic, généralement plus petit, où il connaît une deuxième ébullition.

Le maître distillateur recueille le meilleur de l’eau-de-vie ainsi distillée, appelée coeur de chauffe, en éliminant le début et la fin (appelés têtes et queues), qui seront redistillés par la suite. C’est une étape importante pour le style final du whisky, en fonction des moments choisis par le distillateur pour sélectionner le coeur de chauffe. La taille et la forme des alambics ont une influence importante sur l’eau-de-vie finale.

Un alambic petit et trapu donnera ainsi des whiskies riches et concentrés, souvent d’une grande puissance, alors qu’un autre type plus grand et plus élancé donnera des malts plus légers, mais d’une grande élégance. Les distilleries, en tout cas en Ecosse, sont très fidèles à la forme de leurs alambics. Lorsqu’il faut les remplacer (ce qui arrive tous les 20 à 30 ans environ), ils sont remplacés par des modèles identiques. Et on raconte même dans les Highlands que certains distillateurs vont jusqu’à reproduire bosses et déformations des anciennes chaudières sur leurs nouveaux alambics, afin de s’assurer de leur parfaite similitude. L’eau-de-vie obtenue, encore incolore et qui titre environ 68° d’alcool,prend alors le chemin des chais de vieillissement.

La distillation en continu

Le deuxième type de distillation s’effectue dans un autre type d’alambic, qui se présente sous la forme de colonne, haute de plusieurs mètres. Différentes céréales, maltées ou non, peuvent être utilisées pour obtenir un moût alcoolisé qui va être distillé en une seule fois, selon un processus qui ne s’arrête pas. D’où son nom de distillation «en continu».

Le processus est nettement plus économique, aussi bien en temps qu’en main d’œuvre, mais donne des eaux-de-vie nettement moins riches en arômes et en concentration que le premier procédé.Il existe toutefois des exceptions, comme les petits alambics en continu utilisés aux États-Unis, plus particulièrement pour l’élaboration du bourbon, qui donnent des résultats assez remarquables en puissance aromatique.